Lydie Chamaret, Le tissu est son poème
À la galerie Le champ des possibles à Plogonnec, en octobre 2023, Lydie Chamaret a exposé ses sculptures réalisées dans des tissus de haute couture aux couleurs chatoyantes, et dont la structure rappelle l’alvéole d’abeille. J’ai eu le bonheur de l’assister lors de l’installation de ses œuvres.
D’entrée de jeu, l’inscription dans l’espace s’avéra être un moment d’une surprenante théâtralité.
Au commencement, chacune des réalisations se présente comme un aplat de tissu plus ou moins mince, semblable à un soufflet d’accordéon au repos, que Lydie va déployer. En cet instant, advint la magie.
Car, une fois révélée, l’œuvre se mit à choisir ses lignes, ses contours, ses galbes, ses volumes. Saisissant.
L’étoffe prenait des postures cinétiques. C’était comme une émancipation de la matière. Déconcertant.
L’artiste aurait-elle inventé une morphé changeante ? Lui aurait-elle inspiré une loi interne, imprimé des qualités physiques et dynamiques ? Aurait-elle façonné un objet d’art en perpétuel devenir ? Fascinant.
Enfin, une fois accrochées ou posées, et assagies, réunies en un ensemble harmonieux, farandole colorée suspendue en son mouvement le plus gracieux, les œuvres s’abandonnèrent à l’attente.
Les visiteurs ont été surpris, amusés, charmés. L’imaginaire particulier de chacune et chacun a fait apparaître un coquillage, une fleur, un oiseau, un visage, un symbole. D'aucuns avaient envie de toucher, d’effleurer, de caresser tandis que se coulait doucement en leur être la ouateuse sensation du beau. Toute création artistique doit beaucoup de sa valeur (et l’artiste de sa reconnaissance) au regard amoureux que le spectateur lui porte.
Aujourd’hui, des artistes donnent à la couture, à la broderie, au tissage, ces activités encore réservées il y a peu aux jeunes filles bien élevées, désireuses d’atteindre l’idéal féminin, un caractère poétique, politique et féministe. Dans la lignée d’Anni Albers, en choisissant le tissu comme moyen d’expression, ils ont ouvert un champ sémantique dont on entrevoit à peine la dimension et la force. D’une pratique expérimentale, d’un concept de recherche magistralement abouti, Lydie Chamaret a su élaborer une connaissance, ouvrer un langage et une esthétique qui font de l’artiste un auteur — ou mieux, un poète.
Michel Mélin
Novembre 2023
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À la galerie Le champ des possibles à Plogonnec, en octobre 2023, Lydie Chamaret a exposé ses sculptures réalisées dans des tissus de haute couture aux couleurs chatoyantes, et dont la structure rappelle l’alvéole d’abeille. J’ai eu le bonheur de l’assister lors de l’installation de ses œuvres.
D’entrée de jeu, l’inscription dans l’espace s’avéra être un moment d’une surprenante théâtralité.
Au commencement, chacune des réalisations se présente comme un aplat de tissu plus ou moins mince, semblable à un soufflet d’accordéon au repos, que Lydie va déployer. En cet instant, advint la magie.
Car, une fois révélée, l’œuvre se mit à choisir ses lignes, ses contours, ses galbes, ses volumes. Saisissant.
L’étoffe prenait des postures cinétiques. C’était comme une émancipation de la matière. Déconcertant.
L’artiste aurait-elle inventé une morphé changeante ? Lui aurait-elle inspiré une loi interne, imprimé des qualités physiques et dynamiques ? Aurait-elle façonné un objet d’art en perpétuel devenir ? Fascinant.
Enfin, une fois accrochées ou posées, et assagies, réunies en un ensemble harmonieux, farandole colorée suspendue en son mouvement le plus gracieux, les œuvres s’abandonnèrent à l’attente.
Les visiteurs ont été surpris, amusés, charmés. L’imaginaire particulier de chacune et chacun a fait apparaître un coquillage, une fleur, un oiseau, un visage, un symbole. D'aucuns avaient envie de toucher, d’effleurer, de caresser tandis que se coulait doucement en leur être la ouateuse sensation du beau. Toute création artistique doit beaucoup de sa valeur (et l’artiste de sa reconnaissance) au regard amoureux que le spectateur lui porte.
Aujourd’hui, des artistes donnent à la couture, à la broderie, au tissage, ces activités encore réservées il y a peu aux jeunes filles bien élevées, désireuses d’atteindre l’idéal féminin, un caractère poétique, politique et féministe. Dans la lignée d’Anni Albers, en choisissant le tissu comme moyen d’expression, ils ont ouvert un champ sémantique dont on entrevoit à peine la dimension et la force. D’une pratique expérimentale, d’un concept de recherche magistralement abouti, Lydie Chamaret a su élaborer une connaissance, ouvrer un langage et une esthétique qui font de l’artiste un auteur — ou mieux, un poète.
Michel Mélin
Novembre 2023
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