Hervé Penhoat, L’instant d’après
Hervé Penhoat, photographe, vidéaste, artiste international, porte un regard aimant et imaginatif sur la nature et l’infinité de ses expressions, les paysages. Il est un de ces inventeurs rimbaldiens, instruit du principe de l’universel, dont l’art poétique, inspiré par le chant de la nature, ouvre un nouveau chemin de la connaissance.
Il a exposé dix œuvres singulières à la galerie Le Champ des Possibles, dix photographies argentiques imprimées sur des supports en aluminium. Grâce à un outil numérique de pointe qu’il maîtrise en orfèvre, il peut ajouter de la matière sur des surfaces déterminées, graver plus ou moins profondément un tracé ou encore donner du volume à une ligne. L’effet est saisissant.
Les inventions d’Inconnu réclament des formes nouvelles.
Le procédé est magique; le genre inconnu; le résultat confondant; la conséquence, un ticket d’entrée dans le monde sensible pour une étrange sensation esthétique.
La première entreprise de l’artiste est de connaître le pourquoi, le préexistant, les règles contenues, l’essence même de la chose vue avant de la photographier. Penhoat, n’étant ni un naturaliste ni un rationaliste, sait qu’il n’y a pas d’invariance de la nature, que le paysage n’est jamais fini — il est et peut toujours devenir — et que, sans imagination, il reste quelque chose que nous ne voyons pas. Un paysage, c’est d’abord un dessin, une composition, une destinée des lignes. Il faut en restituer les mystères, les détails qui font son unicité, les ombres qui modèlent les formes et les rendent mouvantes, le continuum rythmé des courbes et des contrecourbes, la lumière dévoilant l’indécis, les noirs qui entaillent ou incisent, les gris nuancés par le velouté des estompes, les blancs qui, comme les silences en musique, apaisent, l’argenté instillant du merveilleux, de l’irréel. La ligne d’horizon souvent placée très haut par le cadrage — quand elle n’est pas indifférenciée — désorganise les plans ou bien les unifie et propose une autre perspective.
L’humain est à sa juste place, minuscules apparitions fantomatiques cheminant au creux d’un vallon ou laissant de très-éphémères traces sur le sable d’un bord de mer.
Le « paysage urbain » (ou plutôt l’espace urbain dans le paysage) répond aux mêmes règles de l’esthétique penhoatienne. Dans la photographie d’une ville de Corée par exemple, la courbe du premier plan, magistrale et les nombreuse lignes brisées séquencent l’image et concourent à un langage discursif sans cesse interrompu déterminant la circulation très active mais désordonnée du regard, donnant l’impression d’un paysage en équilibre instable. Quelques humains silhouettés par la high tech magic machine, s’affairent dans le lieu commun de leur évanescence.
Dans cette géographie de l’insoupçonné, du non encore apparu mallarméen, l’artiste raconte l’histoire que le paysage lui suggère et lui offre un vécu subjectif inattendu. La dialectique esthétique de Penhoat n’oppose pas le réel à la fiction; elle rend la fiction possiblement vraie. Photographier un paysage, c’est l’inventer. Dans le réel est l’invisible.
Loin du pittoresque et de l’iconographie touristique qui hantent le travail de tant de photographes, Penhoat est un étonnant voyageur qui sait où nous emmener dans ses tableaux-énigmes.
Continuité et correspondance artistiques logiques avec la photographie, une somme considérable de vidéos d’une fulgurante beauté est publiée sur le site web de l’artiste. Ces vidéos-poèmes, il les nomme des Instants. Des moments non pas suspendus, non pas figés, mais des fragments d’une éternité qui ne serait plus immobile, des infinis d’une haute poésie évocatoire où, comme pour les photographies, Penhoat y exprime à merveille une conscience intériorisée du temps.
Hervé Penhoat a commencé d’écrire l’instant d’après de la photographie. Un instant soustrait à la ligne du temps, un instant avant- gardiste, l’Instant Poétique, toujours agrandi par une exceptionnelle créativité, fait pour durer.
Michel Mélin
Décembre 2023
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Hervé Penhoat, photographe, vidéaste, artiste international, porte un regard aimant et imaginatif sur la nature et l’infinité de ses expressions, les paysages. Il est un de ces inventeurs rimbaldiens, instruit du principe de l’universel, dont l’art poétique, inspiré par le chant de la nature, ouvre un nouveau chemin de la connaissance.
Il a exposé dix œuvres singulières à la galerie Le Champ des Possibles, dix photographies argentiques imprimées sur des supports en aluminium. Grâce à un outil numérique de pointe qu’il maîtrise en orfèvre, il peut ajouter de la matière sur des surfaces déterminées, graver plus ou moins profondément un tracé ou encore donner du volume à une ligne. L’effet est saisissant.
Les inventions d’Inconnu réclament des formes nouvelles.
Le procédé est magique; le genre inconnu; le résultat confondant; la conséquence, un ticket d’entrée dans le monde sensible pour une étrange sensation esthétique.
La première entreprise de l’artiste est de connaître le pourquoi, le préexistant, les règles contenues, l’essence même de la chose vue avant de la photographier. Penhoat, n’étant ni un naturaliste ni un rationaliste, sait qu’il n’y a pas d’invariance de la nature, que le paysage n’est jamais fini — il est et peut toujours devenir — et que, sans imagination, il reste quelque chose que nous ne voyons pas. Un paysage, c’est d’abord un dessin, une composition, une destinée des lignes. Il faut en restituer les mystères, les détails qui font son unicité, les ombres qui modèlent les formes et les rendent mouvantes, le continuum rythmé des courbes et des contrecourbes, la lumière dévoilant l’indécis, les noirs qui entaillent ou incisent, les gris nuancés par le velouté des estompes, les blancs qui, comme les silences en musique, apaisent, l’argenté instillant du merveilleux, de l’irréel. La ligne d’horizon souvent placée très haut par le cadrage — quand elle n’est pas indifférenciée — désorganise les plans ou bien les unifie et propose une autre perspective.
L’humain est à sa juste place, minuscules apparitions fantomatiques cheminant au creux d’un vallon ou laissant de très-éphémères traces sur le sable d’un bord de mer.
Le « paysage urbain » (ou plutôt l’espace urbain dans le paysage) répond aux mêmes règles de l’esthétique penhoatienne. Dans la photographie d’une ville de Corée par exemple, la courbe du premier plan, magistrale et les nombreuse lignes brisées séquencent l’image et concourent à un langage discursif sans cesse interrompu déterminant la circulation très active mais désordonnée du regard, donnant l’impression d’un paysage en équilibre instable. Quelques humains silhouettés par la high tech magic machine, s’affairent dans le lieu commun de leur évanescence.
Dans cette géographie de l’insoupçonné, du non encore apparu mallarméen, l’artiste raconte l’histoire que le paysage lui suggère et lui offre un vécu subjectif inattendu. La dialectique esthétique de Penhoat n’oppose pas le réel à la fiction; elle rend la fiction possiblement vraie. Photographier un paysage, c’est l’inventer. Dans le réel est l’invisible.
Loin du pittoresque et de l’iconographie touristique qui hantent le travail de tant de photographes, Penhoat est un étonnant voyageur qui sait où nous emmener dans ses tableaux-énigmes.
Continuité et correspondance artistiques logiques avec la photographie, une somme considérable de vidéos d’une fulgurante beauté est publiée sur le site web de l’artiste. Ces vidéos-poèmes, il les nomme des Instants. Des moments non pas suspendus, non pas figés, mais des fragments d’une éternité qui ne serait plus immobile, des infinis d’une haute poésie évocatoire où, comme pour les photographies, Penhoat y exprime à merveille une conscience intériorisée du temps.
Hervé Penhoat a commencé d’écrire l’instant d’après de la photographie. Un instant soustrait à la ligne du temps, un instant avant- gardiste, l’Instant Poétique, toujours agrandi par une exceptionnelle créativité, fait pour durer.
Michel Mélin
Décembre 2023
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