La douleur qui se tait n'en est que plus funeste. Racine, Andromaque, Acte III, scène III |
De nos rêves exaltés, il ne reste que cendre...
En 1988, j'inventais la Maison d'Arthur Rimbaud, là même où Mme Rimbaud avait emménagé avec ses quatre enfants, Isabelle, Vitalie, Frédéric et Arthur, en 1869. J'étais vite rejoint par quelques admirables fous, enthousiasmés par l'idée de créer un lieu ou vivrait la poésie.
Pendant neuf ans, nous y accueillerons sept jours sur sept le public rimbaldien venu du monde entier et organiseront des spectacles, des lectures, des expositions, des concerts, des rencontres avec des poètes, des éditeurs, des artistes.
Toutes les manifestations proposées étaient gratuites. Le Théâtre d'Ern (1) assurait l'administration, la communication et la technique. Le fonctionnement, la rémunération des artistes, le remboursement des frais de transport et de séjour des invités étaient assurés par les fonds propres de l'association, sans subventions (2) et grâce à l'action dévouée et généreuse de tous, bénévoles capables de prodiges et professionnels touchant au sublime.
Aux audacieux, rien d'impossible !
L'aventure finit brutalement en 1997.
Après le décès de Mme Rigaux, propriétaire des lieux, la maison fut mise en vente. N'ayant pas les fonds nécessaires pour l'acheter, nous exhortâmes la mairie de Charleville-Mézières à le faire. Nous avons été entendus - non sans mal. La suite des événements nous sera funeste. D'honorables intrigants locaux parvinrent à nous écarter de toute concertation et à s'approprier ce qu'ils n'avaient pas créé (3). La maison fut enfin rouverte au public en 2004, en grande pompe républicaine, la mairie ayant juste oublié de nous inviter. Sous la tutelle du Musée Rimbaud, elle s'appelle aujourd'hui la Maison des Ailleurs (4).
(1) Compagnie professionnelle fondée en 1981 au sein de Ern hors des mondes et des saisons.
(2) Sans subventions car nous n'en demandions pas.
Au ministère, nous avions le soutien efficace et sans faille de la Direction du Livre, des Relations internationales, des Archives de France. La drac, rancunière et obtuse, tentait vainement de nous ignorer...
(3) Stupéfiant hold-up aujourd'hui oublié. L'Histoire a été réécrite avec succès. Lire l'article de Catherine Rivière dans le numéro de décembre 2013 de la revue In Texto (page 19), une prose qui pourrait passer pour de la désinformation si la journaliste ne citait d'emblée sa source principale. On peut lire aussi ceci sur un des sites de la Ville.
(4) Horaires : 9 h -12 h et 13 h 30 -17 h 30 et pas tous les jours Arthur est bien ailleurs.